Saturday, 15 January 2022

Le cœur de la compréhension - 2. Vides de quoi?

Vides de quoi ?

« Le Bodhisattva Avalokita, en pratiquant la voie profonde de la Compréhension Parfaite, posa son regard éclairé sur les cinq skandhas et les trouva pareillement vides. »

Bodhi signifie éveillé, et sattva désigne un être vivant, donc bodhisattva signifie un être éveillé. Nous sommes tous parfois des bodhisattvas, et parfois pas. Avalokita est le nom du bodhisattva dans ce sutra. Avalokita est juste une version plus courte d’Avalokitésvara. Le Cœur du Sutra de la Prajñaparamita est un merveilleux cadeau que nous offre le Bodhisattva Avalokitésvara. En chinois, en vietnamien, en coréen et en japonais, on traduit son nom par Kwan Yin, Quan Am, ou Kannon, ce qui signifie « celui qui écoute et entend les pleurs du monde afin d’apporter son aide. » En orient, de nombreux bouddhistes lui adressent des prières ou invoquent son nom. Le Bodhisattva Avalokitésvara nous fait le cadeau de la non-peur, parce que lui-même a transcendé la peur. (Parfois Avalokita est un homme et parfois une femme.)

La Compréhension Parfaite est la prajñaparamita. Le mot « sagesse » est généralement utilisé pour traduire prajña, mais je pense que sagesse n’est en quelque sorte pas capable d’en transmettre le sens. La compréhension est comme l’eau qui coule dans un ruisseau. La sagesse et la connaissance sont solides et peuvent bloquer notre compréhension. Dans le bouddhisme, la connaissance est considérée comme un obstacle à la compréhension. Si nous prenons quelque chose pour la vérité, nous pouvons nous y accrocher si fort que, même si la vérité vient frapper à notre porte, nous ne la laisserons pas entrer. Nous devons être en mesure de dépasser nos connaissances précédentes comme si nous gravissions une échelle. Si nous sommes sur le cinquième échelon et nous pensons que nous sommes très haut, il n’y a pas d’espoir que nous montions sur le sixième. Nous devons apprendre à transcender nos propres points de vue. La compréhension, comme l’eau, peut couler, peut pénétrer. Les points de vue, les connaissances et même la sagesse sont solides et peuvent bloquer le chemin de la compréhension.

Selon Avalokitésvara, cette feuille de papier est vide ; mais selon notre analyse, elle est pleine de tout. Il semble y avoir une contradiction entre notre observation et la sienne. Avalokita trouva les cinq skandhas vides. Mais, vides de quoi ? Le mot clé est vide. Être vide, c’est être vide de quelque chose.

Si je tiens une tasse d’eau et je vous demande « Cette tasse est-elle vide ? », vous direz « Non, elle pleine d’eau. » Mais si je verse l’eau et je vous redemande, vous pourriez dire « Oui, elle est vide. » Mais, vide de quoi ? Vide signifie vide de quelque chose. La coupe ne peut être vide de rien. « Vide » ne veut rien dire à Moins que vous ne sachiez « vide de quoi ». Ma tasse est vide d’eau, mais elle n’est pas vide d’air. Être vide est être vide de quelque chose. C’est vraiment une découverte. Quand Avalokita dit que les cinq skandhas sont pareillement vides, pour l’aider à être précis, nous devons lui demander : « M. Avalokita, vide de quoi ? »

Les cinq skandhas, qui peuvent être traduits en français par les cinq tas ou les cinq agrégats, sont les cinq éléments qui composent un être humain. Ces cinq éléments coulent comme un fleuve en chacun de nous. En fait, ils sont en réalité cinq fleuves qui coulent ensemble en nous : le fleuve de la forme, c’est-à-dire notre corps, le fleuve des sentiments, le fleuve des perceptions, le fleuve des formations mentales et le fleuve de la conscience. Ils coulent continuellement en nous. Ainsi, selon Avalokita, quand il regarda profondément la nature de ces cinq fleuves, il vit soudain que tous les cinq sont vides. Et si nous demandions « Vides de quoi ? », il doit nous répondre. Voici ce qu’il a dit : « Ils sont vides d’un soi séparé. » Cela signifie qu’aucun de ces cinq fleuves ne peut exister par lui seul. Chacun des cinq fleuves doit faire partie des quatre autres. Ils doivent coexister ; ils doivent inter-être avec les autres.

Dans notre corps, nous avons des poumons, un cœur, des reins, un estomac et du sang. Aucun de ceux-ci ne peut exister indépendamment. Ils peuvent seulement coexister avec les autres. Vos poumons et votre sang sont deux choses, mais aucun ne peut exister séparément. Les poumons aspirent de l’air et enrichissent le sang et, à son tour, le sang nourrit les poumons. Sans le sang, les poumons ne peuvent pas être vivants, et sans les poumons, le sang ne peut pas être purifié. Les poumons et le sang inter-sont. Il en va de même avec les reins et le sang, les reins et l’estomac, les poumons et le cœur, le sang et le cœur, et ainsi de suite.

Quand Avalokita dit que notre feuille de papier est vide, il veut dire qu’elle est vide d’une existence séparée et indépendante. Elle ne peut pas exister tout seule. Elle doit inter-être avec la lumière du soleil, le nuage, la forêt, le bûcheron, l’esprit et tout le reste. Elle est vide d’un soi séparé. Mais, vide d’un soi séparé signifie pleine de tout. Donc, il semble que notre observation et celle d’Avalokita ne se contredisent pas après tout.

Avalokita a examiné en profondeur les cinq skandhas de la forme, des sentiments, des perceptions, des formations mentales et de la conscience, et il a découvert qu’aucun d’eux ne peut exister par lui-même. Chacun ne peut qu’inter-être avec tous les autres. Ainsi il nous dit que la forme est vide. La forme est vide d’un soi séparé, mais elle est pleine de tout dans le cosmos. La même chose est vraie pour les sentiments, les perceptions, les formations mentales et la conscience.

Méditation

Pas de soi

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