Vides de quoi ?
« Le Bodhisattva Avalokita, en pratiquant
la voie profonde de la Compréhension Parfaite, posa son regard éclairé sur les
cinq skandhas et les trouva pareillement vides. »
Bodhi signifie éveillé, et sattva désigne un être vivant, donc bodhisattva
signifie un être éveillé. Nous
sommes tous parfois des bodhisattvas, et parfois pas. Avalokita est le nom du
bodhisattva dans ce sutra. Avalokita
est juste une version plus courte d’Avalokitésvara.
Le Cœur
du Sutra de la Prajñaparamita est
un merveilleux cadeau que nous offre le Bodhisattva Avalokitésvara.
En chinois, en vietnamien, en coréen et en japonais, on traduit son nom par Kwan
Yin, Quan Am, ou Kannon, ce qui signifie « celui qui écoute et entend
les pleurs
du monde afin d’apporter son aide. »
En orient, de nombreux bouddhistes lui adressent des prières ou invoquent son
nom. Le Bodhisattva Avalokitésvara
nous fait le cadeau de la
non-peur, parce que lui-même a transcendé
la peur. (Parfois Avalokita est un
homme et parfois une femme.)
La Compréhension Parfaite est la prajñaparamita. Le mot « sagesse »
est généralement utilisé pour traduire prajña, mais je pense que sagesse n’est en quelque sorte pas capable d’en
transmettre le sens. La compréhension est comme l’eau qui coule dans un ruisseau. La sagesse et la connaissance sont solides et peuvent bloquer
notre compréhension. Dans le bouddhisme, la connaissance est considérée comme un obstacle à la compréhension. Si nous prenons quelque chose pour la
vérité, nous pouvons nous y accrocher si fort que,
même si la vérité vient frapper
à notre porte, nous ne la laisserons pas entrer. Nous
devons être en mesure de dépasser nos connaissances précédentes comme si nous gravissions une échelle. Si
nous sommes sur le cinquième échelon et nous pensons que nous sommes très haut, il n’y a pas d’espoir que nous montions sur le sixième. Nous devons
apprendre à transcender nos propres points de vue. La compréhension, comme l’eau, peut couler, peut pénétrer. Les
points de vue, les connaissances et
même la sagesse sont solides et peuvent bloquer
le chemin de la compréhension.
Selon Avalokitésvara, cette feuille de papier
est vide ; mais selon notre analyse, elle est pleine de tout. Il semble y
avoir une contradiction entre notre observation et la sienne. Avalokita trouva
les cinq skandhas vides. Mais, vides de quoi ? Le mot clé est vide. Être vide, c’est être
vide de quelque chose.
Si je tiens une tasse d’eau et je vous demande
« Cette tasse est-elle vide ? », vous direz « Non, elle pleine
d’eau. » Mais si je verse l’eau et je vous redemande, vous pourriez dire « Oui, elle est vide. » Mais,
vide de quoi ? Vide signifie vide de quelque chose. La coupe ne peut être vide de rien. « Vide » ne veut rien
dire à Moins que vous ne sachiez « vide de quoi ». Ma tasse est vide d’eau, mais elle n’est pas vide d’air. Être
vide est
être vide de quelque chose.
C’est vraiment une découverte. Quand Avalokita dit que les cinq
skandhas sont pareillement vides, pour
l’aider à être précis, nous devons lui demander : « M. Avalokita, vide de quoi ? »
Les cinq skandhas, qui peuvent être
traduits en français par les cinq tas ou les cinq agrégats, sont les cinq éléments qui composent un être humain. Ces cinq éléments coulent comme un fleuve en chacun de nous. En fait, ils sont en réalité cinq fleuves qui coulent ensemble en nous : le fleuve de la forme, c’est-à-dire notre corps, le fleuve des sentiments, le fleuve des
perceptions, le fleuve des formations mentales et le fleuve
de la conscience. Ils coulent continuellement en nous. Ainsi, selon Avalokita, quand il regarda profondément
la nature de ces cinq fleuves, il vit
soudain que tous les cinq sont vides. Et si
nous demandions « Vides de quoi ? », il doit
nous répondre. Voici ce qu’il a dit :
« Ils sont vides d’un soi séparé. »
Cela signifie qu’aucun de ces cinq fleuves ne peut
exister par lui seul. Chacun
des cinq fleuves doit faire partie des quatre
autres. Ils doivent coexister ; ils doivent inter-être avec les autres.
Dans notre corps, nous avons des poumons, un cœur,
des reins, un estomac et du sang. Aucun de ceux-ci ne peut exister indépendamment.
Ils peuvent seulement coexister avec
les autres. Vos poumons
et votre sang sont deux choses, mais aucun ne peut exister
séparément. Les poumons aspirent de l’air et enrichissent le sang et, à son
tour, le sang nourrit les poumons.
Sans le sang, les poumons
ne peuvent pas être vivants, et
sans les poumons, le sang ne
peut pas être purifié. Les poumons et le sang inter-sont. Il en va de même avec les reins et le sang,
les reins et l’estomac, les poumons et
le cœur, le sang et le cœur, et ainsi de suite.
Quand Avalokita dit que notre
feuille de papier est vide,
il veut dire qu’elle est vide d’une existence
séparée et indépendante. Elle
ne peut pas exister tout seule. Elle doit inter-être avec la lumière du soleil,
le nuage, la forêt, le bûcheron, l’esprit
et tout le reste. Elle est vide
d’un soi séparé. Mais, vide d’un
soi séparé signifie pleine de tout. Donc, il
semble que notre observation et celle d’Avalokita ne se contredisent pas
après tout.
Avalokita a examiné en profondeur les cinq
skandhas de la forme, des sentiments, des perceptions, des formations mentales
et de la conscience, et il a découvert qu’aucun d’eux ne peut exister par lui-même.
Chacun ne peut qu’inter-être avec tous les autres. Ainsi il nous dit que la
forme est vide. La forme est vide d’un soi
séparé, mais elle est pleine de tout
dans le cosmos. La même
chose est vraie pour les sentiments, les perceptions,
les formations mentales et la conscience.
Méditation
Pas de soi
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